L’HYPERTENSION ARTERIELLE REFRACTAIRE
D’après un exposé du Dr Véronique Dormagen
Cardiologue Chef de Pôle GHEM Hôpital Simone Veil Eaubonne
DPC du 10 janvier 2013
C’est une enquête réalisée tous les 2 ans depuis 10 ans en France et portant sur 3462 personnes de plus de 35 ans remplissant un auto-questionnaire, recopiant leur ordonnance et donnant le relevé d’automesures (3 mesures 1 le matin) pour 722 personnes.
1.1.2.1. Traités
30 % des personnes interrogées ont déclaré prendre un traitement anti HTA ce qui, en extrapolant, représenterait 11,4 millions de personnes hypertendues en France. De plus, 10% d’entre elles ont une HTA non traitée ce qui ajouterait encore 4 millions de personnes.
15
millions d’hypertendus en France…
1.1.2.2. Equilibrés
50 % des patients traités sont équilibrés (moyenne de jour MAPA < 135/85 mmHg), valeurs stables, après forte progression 2002-2008 (24 % des patients actifs ; 76 % des patients retraités) inférieurs aux taux observés aux USA, 75-80 %.
7,5
millions d’hypertendus équilibrés en France…
1.1.2.3. Observance
56% des patients se disent bons observants (80% d’observance) ; 34% disent avoir des problèmes mineurs d’observance, enfin 5% ont des problèmes importants.
1.1.2.4. Les enseignements…
Ce sont ces 50 % d’hypertendus traités non équilibrés… même s’ils ne répondent pas tous à la définition retenue par les sociétés savantes et donc 15 % de la population adulte française !
L’HTA est le motif de 17% des consultations de MG en France et 34 % pour les plus de 71 ans (enquête DREES 2002-2004), et pourtant …
D’où réaction de la communauté française spécialisée en HTA, qui a proposé ses propres recommandations en décembre 2012.
De plus l’initiative « OBJECTIF 2015 » à destination des médecins, publié par SFHTA et le Comité de lutte contre HTA, vise à obtenir en 2015 qu’au moins 70 % d’hypertendus traités soient équilibrés.
Selon les recommandations de la Société Européenne d’HTA, l’HTA résistante, encore appelée HTA réfractaire, est définie par des chiffres de pression artérielle (PA) supérieurs à 140/90 mmHg lors de deux consultations successives (2 mesures par consultation) malgré une trithérapie synergique, comportant un diurétique prescrit à dose optimale, pendant une période d’au moins 6 semaines.
« Objectif
tensionnel non atteint malgré mesures hygiéno
diététiques et triple thérapie dont au moins 1 diurétique thiazidique »
L’obtention d’un équilibre tensionnel adéquat (objectif < 140/90 mmHg) nécessite au moins deux médicaments chez plus de la moitié des patients. Ce n’est qu’à partir de trois médicaments que l’on parlera d’hypertension réfractaire.
Les médicaments utilisés doivent appartenir à des classes thérapeutiques différentes agissant en bonne synergie. De manière générale, l’association d’un médicament agissant sur l’excès de volume (antagoniste calcique, diurétique) avec un médicament agissant sur les résistances vasculaires : inhibiteur de l’enzyme de conversion, sartan voire un bêtabloquant.
1.2.2.1. Ce que disent les études…
L’étude NHANES de 2011
Aux USA les chiffres pour la période 2003-2008, 12,8% des HTA traitées avec plus de 3 molécules. Les comorbidités sont : l’âge, un IMC élevé, DFG, un diabète, des antécédents, d’AVC, d’IDM ou d’IC.
1.2.2.2. L’étude publiée par Circulation en 2012
C’est une étude rétrospective portant sur 205 750 hypertendus traités. Les critères retenu pour définir l’HTA résistante étaient : HTA non équilibrée sous au moins 3 médicaments ou équilibrée sous au moins 4, et, enfin, au moins 80 % d’observance.
Les résultats donnent un taux de résistance à 1,9 % à 18 mois. Les facteurs associés étaient : l’âge, l’existence d’un diabète, un traitement comprenant des bêtabloqueurs, des inhibiteurs calciques et des alpha-bloqueurs.
Dans ce cas c’est 18% de complications cardiovasculaires versus 13,5% si l’HTA est équilibrée.
1.2.2.3. Equipe HEGP (Pr Girerd)
La cohorte est basée sur 796 patients adressés pour HTA « résistante ». Après optimisation du traitement :
· 13,6% restent résistants sous 3 médicaments
· 3,6 % restent résistants sous 4 médicaments
· 2,1% restent résistants sous 4 médicaments dont la spironolactone, soit 17 patients
Lorsqu‘elle est confirmée, l’HTA résistante n’est pas neutre en termes de complications vasculaires car, dans cette série, on observe 35% de complications cardiovasculaires.
1.2.2.4. Quelques pistes…
La non-réponse au traitement antihypertenseur est souvent liée à une rétention hydrosodée, même sub-clinique.
Étant donné la difficulté d’obtenir une restriction sodée chez beaucoup de patients, la prescription d’un diurétique sera souvent nécessaire pour atteindre l’objectif tensionnel. On choisira un diurétique thiazidique si la fonction rénale est normale ou légèrement altérée, un diurétique de l’anse en cas de clairance < 30 ml/min.
Enfin, des travaux récents ont montré l’intérêt de l’adjonction de spironolactone à faible dose en cas d’hypertension difficile à contrôler, qu’il y ait ou non un hyperaldostéronisme associé.
L’absence de contrôle adéquat de l’hypertension est bien souvent due à une inertie thérapeutique du médecin qui répugne à ajouter un médicament ou à en augmenter la dose, en particulier pour les diurétiques.
Pour le médecin généraliste : affirmer la résistance
au traitement.
1. Éliminer une pseudo-HTA ?
2. Préciser l’effet blouse blanche ? L’HTA est-elle permanente ?
3. Déterminer le niveau d’observance,
4. Éliminer des interactions médicamenteuses délétères ; quid de l’alcool et du sel ?
5. Déterminer l’existence éventuelle de situations cliniques particulières
6. Le traitement est-il optimal ? Tous les traitements se valent ils ?
Au terme de cette démarche, le recours à une consultation
spécialisée est nécessaire…
1. Éliminer une HTA secondaire
2. Envisager l’introduction de la spironolactone
3. En dernier recours, dans des cas très précis discuter une dénervation rénale
Une majoration des chiffres peut être observée dans de nombreuses circonstances :
· Le brassard est trop petit (la poche gonflable doit couvrir au moins les 2/3 du bras) ; au quotidien, il faudrait disposer de 3 tailles de brassard
· Le brassard est positionné plus bas que le cœur, s’il est trop serré
· En cas de réaction d’alarme, l’absence de repos …
En cas d’asymétrie tensionnelle, il faut prendre en compte le chiffre le plus élevé
Il existe, en plus, des difficultés d’interprétation par rapport aux objectifs tensionnels, tout particulièrement pour les patients de moins de 80 ans, y compris les diabétiques et les insuffisants rénaux (sauf cas particuliers de progression ou de complications).
Au-delà de 80 ans, l’objectif est de < 150/90 mmHg.
2.2.2.1. C’est un problème quotidien
Il est responsable du non changement de traitement en dépit de chiffres tensionnels élevés dans 50 % des consultations (enquête PARITE auprès de cardiologues). Elle est responsable en partie de l’inobservance et de l’inertie médicale car « les chiffres ne sont jamais pareils », « on ne peut rien déduire des chiffres en consultation »…
A l’échelon individuel, la variabilité TA entre 2 consultations peut être plus importante que l’effet attendu du traitement. Le seul moyen de réduire la variabilité tensionnelle est de multiplier les mesures…
Ce problème est repris par la méta-analyse du BMJ publiée en 2011 comparant la mesure clinique de TA, l’automesure et la MAPA et portant sur 5860 patients (48 ans en moyenne). Il en ressort que la méthode de référence est la MAPA et que la moyenne de jour doit être > 135/85 mmHg.
Prévalence HTA |
VPP mesure clinique |
VPP automesure |
VPN mesure clinique |
VPN automesure |
10 % |
19 % |
25 % |
97 % |
96 % |
30 % |
47 % |
56 % |
90 % |
87 % |
50 % |
67 % |
75 % |
80 % |
75 % |
Toutes les recommandations récentes insistent ainsi sur la nécessité des mesures réalisées en dehors du cabinet, avant de définir une HTA résistante…
Entre la MAPA et l’automesure, Il existe des discordances assez nombreuses, surtout pour les valeurs tensionnelles proches des seuils. Les recommandations étrangères privilégient la MAPA (NICE 2011, Australie 2012). En France recommandations de la SFHTA 2012 sont en faveur de l’automesure en raison des limitations de la MAPA :
· L’accessibilité de la MAPA et la non-cotation CAM
· La tolérance imparfaite par les patients (2 déplacements, et désagréable)
L’automesure a une valeur éducative et favorise.
2.2.2.2. L’automesure
Il y a environ 7 millions d’appareils d’automesure, dont 4 millions chez des hypertendus traités. Les enquêtes révèlent que l’automesure est le plus souvent mal utilisée et qu’une éducation thérapeutique est nécessaire (site www.automesure.com).
Il faut, si possible, conseiller achat de brassard huméral et validé. Si le brassard est radial, il faut montrer le positionnement du brassard, et du bras, de prendre une bonne position (assis dos adossé; bras dénudé et posé, détendu; sans bouger ni parler), après repos de 5 mn.
Il faut faire plusieurs mesures :
Le matin avant petit déjeuner, et le soir après le diner
3 fois de suite à 1 minute d’intervalle, matin et soir, 3 jours de suite (recommandations France), avant consultation, 1 fois / mois si HTA non équilibrée, puis tous les 3 à 6 mois è Règle des 3 è 18 mesures à consigner sur un document à rapporter lors de la consultation.
Il est important de préciser l’objectif à atteindre : une moyenne tensionnelle < 135/85 mmHg
2.2.2.3. Les limites de l’automesure
L’automesure est inadaptée pour
La conséquence est la nécessité d’un recours à la MAPA très souvent (recommandations SFHTA 2012)
Rappel des normes tensionnelles en dehors du cabinet
Automesure
(mmHg) |
MAPA
(mmHg) |
Moyenne
de 18 prises < 135/85 |
Moyenne des 24 h < 130 /
80 Moyenne de jour < 135 /
85 Moyenne de nuit < 120 / 80 |
La mauvaise observance du traitement serait responsable de 50 % des HTA paraissant résistantes…
2.2.3.1. Définition
C’est la bonne concordance entre les prescriptions/recommandations et le comportement du patient concernant le suivi de la prescription médicamenteuse (horaire, doses, durée…), des règles hygiéno-diététiques, et du suivi médical.
Un patient est dit « bon observant » s’il prend 80% du traitement correctement.
1/3 bonne observance, 1/3
observance partielle, 1/3 mauvaise observance
Les facteurs favorisant la non-observance associent le faible niveau socio-économique, la qualité de la relation médecin-patient, le suivi médical irrégulier, l’échec du traitement ou sa mauvaise tolérance, le déni de la maladie.
2.2.3.2. Dans une étude rétrospective sur 4087 patients
Elle reprenait différentes études de phase 4 de traitement antihypertenseur (BMJ 2008) ; 2088 ARA2, 937 ICa, 665 IEC, 195 BB, 135 DIU) avec suivi de l’observance par pilulier électronique, 2 composantes de l’observance ont été étudiées :
· Persistance : temps pendant lequel le traitement est pris
· Qualité d’exécution du traitement, au quotidien
Les résultats montrent que 50% des traitements sont arrêtés à 1 an et 10% des doses non prises quand le traitement est poursuivi. De plus :
· 95% oublient 1 dose (30 heures) au moins 1 fois dans l’année
· 50% oublient 1 dose au moins 1 fois par mois
· 48% font une pause d’au moins 3 jours au moins 1 fois par an
· 13% font une pause d’au moins 3 jours au moins 6 fois par an
L’inobservance augmente avec le nombre de prises de médicaments. Elle dépend aussi de l’heure de prise, l’observance le matin étant meilleure.
2.2.3.3. Évaluer l’observance
C’est difficile mais indispensable pour le repérage des mauvais observants. Il n’y a pas de méthode de référence mais le Comité de lutte contre HTA recommande le questionnaire suivant
1. Ce matin, avez-vous oublié de prendre votre médicament ?
2. Depuis la dernière consultation, avez-vous été en panne de médicament ?
3. Vous est-il arrivé de prendre votre traitement avec retard par rapport à l’heure habituelle ?
4. Vous est-il arrivé de ne pas prendre votre traitement parce que certains jours votre mémoire vous fait défaut ?
5. Vous est-il arrivé de ne pas prendre votre traitement parce que certains jours vous avez l’impression que votre traitement vous fait plus de mal que de bien ?
6. Pensez-vous que vous avez trop de comprimés à prendre ?
(0 oui
= bonne observance, 1 à 2 oui = minime problème d’observance, ≥ 3 oui =
mauvaise observance)
Il est plus facile de repérer les facteurs prédictifs de mauvaise observance
· Niveau socio culturel très bas +++
· Handicap, dépendance, troubles psy ou cognitifs
· Facteurs psycho-sociaux : accès aux soins, solitude, dépression, erreurs de mode de vie : diététique, tabagisme, éthylisme...
· Niveau d’information sur maladie, traitement…
· Préjugés et craintes vis à vis du médicament (fausses croyances)
2.2.3.4. Améliorer l’observance
Il faut être conscient du risque d’inobservance et en parler à chaque consultation.
Il est important d’identifier précocement les inobservants car ce sont eux qui vont arrêter leur traitement. Il faut repérer les patients à risque et évoquer les situations « à risque », week-ends et congés.
Il est important
· De simplifier le traitement : 1 prise quotidienne, le matin (+ schéma adapté aux habitudes du patient)
· De choisir des médicaments les mieux tolérés et adaptés au patient (galénique, goût…)
· De préférer les médicaments à ½ vie longue, et si besoin la prescription d’associations fixes
· D’informer sur les effets secondaires
· De ne pas occulter les problèmes des génériques, en général plus prompts à induire une non-observance.
95%
oublient 1 dose (30 heures) au moins 1 fois dans l’année
50%
oublient 1 dose au moins 1 fois par mois
48%
font une pause d’au moins 3 jours au moins 1 fois par an
13%
font une pause d’au moins 3 jours au moins 6 fois par an
C’est le même principe que l’annonce en cancérologie qui doit se faire au cours d’une consultation longue. Selon une préconisation de la SFHTA (2012), elle serait faite par le médecin généraliste avec les objectifs suivant proposés par la
1. Définition de l’hypertension artérielle
2. Origine de l’hypertension artérielle
3. Conséquences de l’hypertension artérielle
4. Réversibilité du risque attribuable
5. Moyens thérapeutiques
6. Schémas thérapeutiques
7. Temporalité
8. Objectifs
9. Balance décisionnelle (bénéfices/risques, avantages/inconvénients)
10. Approfondissement : renforcement de motivation à partir des réflexions du patient au cours de l’entretien : insister sur le risque pour ce patient (ressenti de menace) et sur les bénéfices potentiels pour ce patient
Il convient de vérifier qu’il n’y ait pas de médications qui limitent l’efficacité du traitement antihypertenseur. Les principales sont :
· L’alcool ++++ n° 1 en France
· Les œstrogènes ++ de façon dose dépendante
· Tous AINS +++ y compris les OTC et l’application locale si large et répétée
· Inhibiteur de recapture de sérotonine et noradrénaline (Effexor™, Ixel™)
· Paracétamol effervescent à forte dose (380 mg de Na par comprimé)
· Corticoïdes, cyclosporine, EPO
· Cocaïne amphétamines
· Sympathomimétiques et réglisse rarement
· Inducteurs enzymatiques
Le lien entre HTA et consommation de sel reste controversé, même si une consommation excessive de sel est un facteur de résistance en raison d’une hypervolémie et d’une moins bonne efficacité des traitements. Chez l’hypertendu, il faut réduire la consommation de sel, idéalement aux alentours de 5 g de NaCl / jour, alors que bien qu’en baisse, la consommation moyenne en France en 2011 est de 10 g chez les hommes et de 8 g chez les femmes.
Pour un patient, la quantification est possible mais difficile par natriurèse des 24h.
Le
sel au quotidien en France |
· Sel rajouté sur la table et pendant cuisson · Pain, charcuterie, condiments et sauces · Plats cuisinés et pizzas, fromages, soupes · Méconnaissance par les patients · 1 g de sel = 1 tranche de saucisson = 1 poignée de chips = 1 part de pizza = 4 tranches de pain… |
En pratique il faut demander, au moins, la suppression de la salière et de la charcuterie…
2.2.7.1. HTA & obésité
L’obésité multiplie par 6 le risque d’HTA par activation du SRAA et du système sympathique. De plus, l’obésité abdominale (graisse brune) majore le risque cardiovasculaire par un effet pro inflammatoire.
Chaque 10 kg de poids augmente de 3 mmHg la PAS ! La surcharge pondérale est un déterminant majeur de 2/3 des HTA.
Il existe une relation linéaire entre perte de poids et TA mais la diminution reste modeste. Cependant, la perte de poids est indispensable, surtout pour le contrôle des autres facteurs de risque cardiovasculaires.
Il n’y a pas de traitement spécifique. Il faut éviter en 1ère intention (sauf besoin spécifique), les thiazidiques, en raison de leur effet diabétogène et les bêtabloquants qui limitent la baisse de poids. Il faut favoriser les IEC/sartan en raison de la diminution du risque d’apparition d’un nouveau diabète et aussi de favoriser association IEC/sartan + inhibiteur calcique (étude ACCOMPLISH : IMC moyen 31).
Étude
ALLHAT IMC moyen 30 % diabète
à 4 ans |
Présence
d’un syndrome métabolique |
Absence de
syndrome métabolique |
Thiazidique |
7,7 |
17,1 |
IEC |
4,7 |
12,6 |
Dihydropyridine |
4,2 |
16 |
2.2.7.2. Le syndrome d’apnée du sommeil (SAS)
Il s’agit d’un facteur aggravant reconnu d’HTA. Cette situation clinique reste insuffisamment dépistée alors qu’elle concernerait environ 2 à 4 hypertendus obèses sur 10.
Il est fréquemment associé à une obésité, à une insulinorésistance, des facteurs associés de résistance au traitement (60 % de SAS sur une série de 125 patients explorés pour HTA résistante). Les éléments évocateurs sont :
· HTA souvent masquée
· Une élévation plus marquée sur PA diastolique
· HTA souvent nocturne
· Pas de diminution nocturne en MAPA (non-dipper)
Il est donc recommandé de réaliser un enregistrement du sommeil en cas d’HTA résistante et de terrain évocateur.
Les apnées, par l’hypoxie-hypercapnie, induisent une stimulation du système nerveux sympathique, une élévation des résistances vasculaires périphériques, une hypertension à prédominance nocturne et une diminution de l’efficacité du traitement.
L’efficacité de la CPAP sur l’HTA est cependant controversée. C’est la perte de poids qui va être un objectif prioritaire du traitement
2.2.7.3. HTA du sujet très âgé
Le traitement bénéficie aux patients âgés de plus de 80 ans comme l’a montré l’étude HYVET (indapamide ± perindopril). Les limites de cette étude étaient qu’elle portait sur une population en bon état général, non institutionnalisée et avec peu de comorbidités. Ces résultats contrastent avec augmentation de mortalité dans méta analyse préalable.
Elles sont :
· De toujours rechercher une hypotension orthostatique et un effet blouse blanche
· D’avoir pour objectif < 150/90 mmHg (ou diminution de 20 mmHg pour la systolique), en se basant plutôt sur TA debout
· D’utiliser au maximum 3 médicaments sans hypotension orthostatique en évitant les IEC et les sartans.
· D’éviter le régime sans sel
· De donner des conseils pratiques comme
o De prévoir des bas de contention,
o De recommander de croiser les jambes avant de se lever,
o De dormir ½ assis et de décomposer le lever.
2.2.7.4.
L’insuffisance rénale est un facteur de résistance
L’aide du néphrologue est indispensable. Le bilan comporte une imagerie rénale pour estimer la taille des reins et rechercher une sténose artérielle selon terrain (avis néphrologue)
Si clearance créatinine < 30 ml/mn, c’est une contre-indication aux thiazidiques et à la spironolactone et une indication à utiliser les diurétiques de l’anse (Lasilix™, Burinex™, génériques). Il faut adapter doses d’IEC/sartan. La place des inhibiteurs calciques, des centraux, des bêtabloquants dépendra du terrain.
2.2.8.1. Tous les traitements se valent ils ?
Il faut se souvenir que l’utilisation des ARA2 est associée à la plus longue persistance de traitement sur le long terme, du fait d’une bonne tolérance.
Au sein d’une même classe, l’efficacité dépend aussi de la durée d’action…
|
|
2.2.8.2. Tous les thiazidiques se valent ils ?
L’hydrochlorothiazide est moins efficace que l’indapamide. La réduction de risque d’évènements cardiovasculaires sous chlortalidone est plus rapide que sous HCTZ= 18
En cas d’HTA résistante, on peut envisager :
· Une augmentation de l’hydrochlorothiazide (au moins 25 mg)
· Un changement de thiazidique (indapamide, altizide, chlortalidone)
2.2.8.3. Au quotidien, le traitement optimal comprend:
Il comprend les médicaments suivants :
· 1 Bloqueur du système rénine angiotensine (BSRA) en monoprise et à demi vie longue
On attend la triple association dans 1 seul comprimé et remboursée par SS.
Il faut la rechercher une HTA secondaire quand l’HTA est réellement résistante au terme de la démarche décrite plus haut ou, avant, s’il existe des éléments d’orientation comme :
Les causes plus fréquentes dans ce cas sont :
· Les hyperaldostéronismes
· Les maladies rénales (insuffisance rénale +++, sténose artère rénale)
o Néphropathies parenchymateuses (majoration de la créatinine plasmatique, anomalies du sédiment, protéinurie élevée)
o Néphropathies vasculaires (sténoses athéromateuses des artères rénales chez le patient âgé, polyvasculaire, présentant plusieurs facteurs de risque ou plus rarement dysplasie fibromusculaire chez la jeune femme).
· Le phéochromocytome très rare
Facteurs favorisant la résistance au
traitement antihypertenseur |
• Hyperaldostéronisme o Primaire : Conn, hyperplasie bilatérale des surrénales o Secondaire : sténose artérielle rénale, tumeur à rénine • Néphropathies • Phéochromocytome • Hypercorticisme • Dysthyroïdie • Coarctation aortique |
Kaliémie et créatinine systématiques ; angioscanner rénal et surrénal « facile »
2.3.1.1. L’hyperaldostéronisme primaire
Il est le plus souvent dû à l’existence d’une hyperplasie surrénalienne, plus rarement à un adénome de Conn (intérêt du rapport aldostérone/activité rénine plasmatique pour le dépistage). Cette affection est nettement plus fréquente en cas d’hypertension sévère ou réfractaire et, contrairement à une vieille idée, n’est associée à une hypokaliémie que dans une minorité de cas.
Il faut aussi penser au syndrome de Cushing (obésité tronculaire, visage lunaire, faiblesse musculaire.
2.3.1.2. Sténose d’artère rénale athéromateuse
Six grands essais montrent l’absence de supériorité de l’angioplastie rénale par rapport au traitement médical sur les chiffres tensionnels. En particulier, il n’y a pas de normalisation tensionnelle après angioplastie de SAR athéromateuse…
Le risque cardiovasculaire de ces patients est très élevé et l’essentiel réside dans la prise en charge du risque cardiovasculaire par
· Les BSRA (diminution du risque de dialyse)
· Les antiagrégants, les statines
Dans un cas de figure, il s’agit d’une HTA du sujet jeune en rapport avec des sténoses fibrodysplasiques, dans 1 % de cas dont le traitement est la dilatation.
L’autre cas de figure est un terrain athéromateux associé à une HTA « vraiment » résistante, et/ou majoration de la créatininémie, en particulier sous BSRA. L’Indication de dilatation sera portée sur des critères rénaux, diminution de taille de rein, diminution de filtration glomérulaire.
2.3.1.3. Phéochromocytome
C’est très rare mais très grave (malignité). )
Classiquement, il existe des pics tensionnels et une triade de céphalées, sudations et palpitations.
Il ne faut pas passer à côté et doser les métanéphrines + normétanéphrines sur les urines de 24 h
Peu d’interférences médicamenteuses
C’est une
option intéressante au-delà de la tri-thérapie. La
posologie de spironolactone ne doit pas dépasser 25 mg / jour.
Dans ce contexte, il faut impérativement éviter hyperkaliémie et les effets secondaires.
Tout d’abord il existe une contre-indication en cas d’insuffisance rénale. Il faut surveiller la kaliémie +++, très régulièrement en particulier en cas d’association avec les BSRA.
Éventuellement, on peut la prescrire sous forme d’Aldactazine™ (25 mg spironolactone + 15 mg altizide : diurétique plus efficace que HCTZ).
L’Inspra™ (éplérénone) n’a pas d’AMM pour l’indication HTA. Elle est 3 fois moins efficace que spironolactone comme l’ont monté les études « SIMPLICITY » :
2.3.3.1. Contexte
Historiquement, la dénervation rénale chirurgicale a été pratiquée à grande échelle chez les hypertendus sévères et compliqués dès la fin des années 1930, alors que le traitement médicamenteux n’existait pas encore.
L’intervention la plus courante consistait en une sympatho-splanchnicectomie dorsolombaire ou intervention de Smithwick, par résection des ganglions sympathiques de D8 à L1 (au maximum de D6 à L3) et des nerfs splanchniques destinés au ganglion cœliaque. La procédure était particulièrement invasive, parfois réalisée en deux temps au cours d’une hospitalisation de 15 jours et grevée d’une mortalité périopératoire de l’ordre de 5 %.
Les effets indésirables de cette dénervation complète et étendue étaient nombreuses, invalidantes et durables (lombalgies, radiculagies, hypotension orthostatique, troubles sphinctériens et sexuels, hypersudation paradoxale).
La diminution de la TA était inconstante, observée dans environ 50 % des cas.
L’avènement de médicaments antihypertenseurs dans les années 1960 a fait abandonner cette chirurgie.
C’est une méthode
nouvelle qui permet la destruction des fibres nerveuses sympathiques qui
cheminent dans l’adventice des artères rénales. Une étude clinique randomisée
(SIMPLICITY 2) a montré une baisse de la tension artérielle chez des patients
hypertendus résistants aux médicaments antihypertenseurs.
La dénervation rénale par radiofréquence appliquée par voie endovasculaire est une méthode qui réalise une destruction des fibres nerveuses périphériques qui engainent le tronc des artères rénales. Elle induit une diminution du tonus sympathique d’origine rénal avec une baisse de la pression artérielle.
2.3.3.2. Indication (réunion de consensus)
Actuellement l’indication à la dénervation rénale devrait se limiter aux patients qui ont une HTA essentielle non contrôlée sous quadrithérapie ou plus avec un traitement comportant au moins un diurétique, la spironolactone à la dose de 25 mg ayant été inefficace, avec au moins une tension artérielle systolique (TAS) > 160 mmHg et/ou une tension artérielle diastolique (TAD) > 100 mmHg en consultation et la confirmation d’une TAS > 135 mmHg et d’une TAD > 85 mmHg en automesure (ATM) ou par mesure ambulatoire de la pression artérielle (MAPA).
L’anatomie des artères rénales doit être compatible avec cette intervention
• 2 reins fonctionnels,
• Absence d’antécédents d’angioplastie
La dénervation rénale est une intervention complexe pouvant présenter des risques de complication artérielle.
La technique de dénervation rénale ne peut s’appliquer chez les patients hypertendus ayant :
· Une sténose d’une artère rénale > 30 %.
· Une dysplasie fibromusculaire artérielle rénale
· Age de moins de 18 ans.
· Une grossesse en cours.
Complications liées à la dénervation rénale : fréquence inférieure à 1 %
· -Douleurs abdominales pendant la procédure (qui seront atténuées ou évitées par l’utilisation d’antalgiques et/ou d’anesthésiants)
· -Atteinte de la paroi artérielle liée à la radiofréquence et/ou aux ultrasons (risque théorique).
· -Hypotension en particulier en position debout
· -Hématurie
L’HTA est une maladie difficile à traiter car elle parait souvent « inconsistante » car :
· Elle est asymptomatique et très fluctuante
· Les recommandations sont multiples
· Les médicaments extrêmement nombreux
En revanche, le bénéfice du traitement est indiscutable…
Le traitement de l’HTA résistante passe par « la résistance du médecin » qui doit :
· Éduquer et motiver son patient
· Respecter les recommandations les plus récentes (plurithérapie +++)
· Contrôler la TA en dehors du cabinet,
L’HTA résistante est une affection rare puisqu’elle ne concerne que 5 à 10 % des HTA traités.
Une cause curable ne sera retrouvée que chez 10 % d’entre eux.
Recommandations 2012 de la SFHTA pour la prise en charge de l’HTA de l’adulte (www.sfhta.eu)
Recommandations 2011 de la SFHTA sur la mesure de la pression artérielle (www.sfhta.eu)
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