EPU95-Montmorency

Affections Respiratoires & Maladies Allergiques

 Mise à jour du 24 Avril 2007

Prise en charge de l’Asthme de l’Adulte

Dr S. Salmeron

Chef de service de Pneumologie - Hôpital Saint Joseph Paris

Séance du 4 septembre 2003

 

1.    L’ASTHME : UN PROBLÈME DE SANTÉ PUBLIQUE

La prévalence de l’asthme en France s’est considérablement accrue depuis les dernières décades.

Les symptômes cliniques pris en compte et notés sur les questionnaires permettent le diagnostic d’asthme sans avoir recours aux EFR (par exemple toux nocturne et réveil la nuit avec sifflement)

La prévalence cumulée (personnes ayant ou ayant eu des manifestations d’asthme) est en France de :

4           8% de la population générale correspondant à 5 Millions de sujets.

4           Pour une population de jeunes comprise entre10 et 25 ans le pourcentage est de 10 à15 %.

4           La prévalence actuelle (sujets ayant eu des manifestations lors des douze derniers mois) est de 5% 

4           Les hospitalisations liées à l’asthme sont nombreuses

4           Le nombre de décès liés à l’asthme est de 2 000 par an.

4           L’absentéisme scolaire est en outre sous estimé

4           Les dépenses globales de santé concernant l’asthme sont de 1,5 milliards d’Euros en 2001 répartis :

o         2/3 en coûts directs è 60 % revient à la prise en charge hospitalière

o        1/3 en coûts indirects

L’âge est un élément de gravité à prendre en compte. En vieillissant le pourcentage d’asthmes légers diminue alors que celui des asthmes sévères notamment cortico-dépendants augmente.

 

2.    DÉFINITION DE L’ASTHME

2.1. Les différentes définitions

La définition ancienne ne donnait aucune idée de la physiopathologie :

« L’asthme est une maladie qui donne des accès de dyspnée paroxystiques sifflantes régressant spontanément sans ou sous traitement bronchodilatateurs. »

Lorsque l’on a voulu introduire la notion d’inflammation, les experts internationaux ont voulu que la définition tienne compte des aspects physiopathologiques :

« L’asthme est une maladie inflammatoire chronique des bronches (où toutes les cellules inflammatoires sont impliquées, mais où les éosinophiles ont un rôle particulier) ».

2.2. Une définition, parmi d’autres…

Il se caractérise par une obstruction bronchique diffuse, variable, réversible.

Pourquoi diffuse ? Car il s’agit d’une affection qui touche l’ensemble de l’arbre bronchique à la différence d’une obstruction localisée (tumeurs, corps étrangers, …) qui peut aussi entraîner une dyspnée sifflante et même parfois paroxystique). L’examen radiographique est nécessaire devant des symptômes évocateurs d’asthme pour éviter une erreur diagnostique.

L’obstruction dans l’asthme est liée à une hyper-réactivité bronchique.

L’asthme se caractérise par des symptômes variables diversement associés : toux (froid, nocturne, effort), sifflement (bronchite sifflante), oppression thoracique (nocturne, dyspnée d’effort), expectoration. »

L’asthme est sous diagnostiqué chez l’enfant et l’adulte malgré des symptômes évocateurs.

 

3.    LE ROLE DE L’INFLAMMATION DANS L’ASTHME

Dans la quasi-totalité des cas, c’est l’inflammation à l’intérieur des bronches qui va déclencher les problèmes.

Une bronche normale vue en coupe : 

4           Est un tuyau rond qui permet à l’air (O2) de pénétrer jusqu’aux alvéoles et d’en ressortir lors de l’expiration

4           A sa périphérie il existe un muscle qui, lorsqu’il se contracte, rétrécit le diamètre de la bronche gênant le passage de l’air

Dans l’asthme, quand la gêne respiratoire apparaît, le muscle se contracte et la respiration devient difficile.

4           Cela est connu depuis très longtemps.

4           La prise d’un médicament ß 2 mimétique qui relâche le muscle entraîne une amélioration rapide.

4           Si la prise de ce médicament doit être répété par manque d’amélioration (2, 3 fois,… 6 fois si ce n’est 10), et si la gêne oblige le patient à s’asseoir, le bronchospasme n’est pas seul en cause et l’inflammation est toujours présente.

 

 

Une bronche inflammatoire a en coupe un aspect différent d’une bronche normale

4           La muqueuse est épaissie, rouge, liée à l’inflammation

4           L’inflammation toujours présente dans l’asthme est capable d’exciter le muscle et d’entraîner sa contraction.

Dans ce cas, si on veut réduire la gêne liée à l’inflammation

qui est initiale, il faut donner un anti-inflammatoire pour supprimer la cause de la bronchoconstriction.

Dans le système immunitaire extrêmement complexe, les cellules intelligentes sont les lymphocytes. On sait actuellement que les lymphocytes peuvent s’orienter dans deux directions en fonction de leur différenciation et aboutir :

-             Soit à la cellule Th1 qui est une cellule entrant dans le système de lutte contre les infections,

-             Soit à la cellule Th2 qui vont déterminer dans le sang les réactions allergiques (terrain atopique, …). L’excès de production de ces cellules Th2 dans la paroi bronchique favorise la production de facteurs activant les éosinophiles, et toutes ces cellules relarguent des médiateurs qui font contracter les muscles bronchiques.

L’inflammation est le mécanisme sous jacent de l’asthme et les corticoïdes sont les molécules de base du traitement.

-             Dans cette complexité de l’asthme, il existe des cellules productrices de leucotriènes. Les leucotriènes sont directement proinflammatoires et directement bronchoconstricteurs. Les corticoïdes s’opposent peu ou pas à l’action des leucotriènes.

-             Sur le plan pratique, les corticoïdes inhalés sont nettement prioritaires, et l’utilisation d’un anti-leucotriènes (per os) peut y être associé en cas de nécessité.

Pour aborder la prise en charge d’un asthmatique, il faut être imprégné de cette notion d’inflammation dans l’asthme afin de pouvoir correctement expliquer au patient ce qu’il a, le pourquoi et le comment du traitement.

Cette éducation doit être progressive, pas à pas lors de chaque consultation et fonction de la situation pour que son attention soit attirée par des symptômes qui, pour lui et son entourage, peuvent passer comme insignifiants.

Le patient doit prendre conscience que son asthme est une maladie inflammatoire chronique des bronches à ne pas négliger.

 

4.    PIEGES AU DIAGNOSTIC

4.1. Deux situations

Si le diagnostic d’asthme est facile dans les cas typiques, deux situations doivent rendre prudent le clinicien puisqu’il s’agit d’une constatation toujours actuelle :

La situation la plus fréquente est la non reconnaissance de l’asthme et cela quel que soit l’âge du patient (aussi bien chez l’enfant que chez l’adulte).

-             Soit que les symptômes soient minimisés par le patient et/ou l’entourage,

-             Soit que le ou les symptômes soient insuffisamment étudiés ou recherchés par le clinicien, de même que le terrain sur lequel il survient, pour pouvoir évoquer cliniquement le diagnostic d’asthme et le confirmer par des épreuves fonctionnelles respiratoires (EFR).

La situation la plus triste est celle du diagnostic par excès. Le diagnostic est posé sans avoir préalablement éliminé une cause locale et en particulier un cancer. Le problème est ici celui de la radio du thorax : soit absence d’une radiographie initiale, soit mauvaise interprétation.

4.2. Trois cas cliniques comme exemples

1° cas

Un patient de 36 ans, suivi depuis 15 ans, prenait des médicaments mais de façon très périodiques. Aux questions :

-             « vous n’avez pas d’asthme ?», il répondait « non,non, c’est de l’allergie sans plus »

-             « pas de sifflement ?», « non, sauf 2 ou 3 fois la nuit »

-             « il y a une gêne respiratoire ? », « non, sauf une fois au collège et une autre fois à la campagne et là heureusement que j’avais de la Ventoline™, parce que ça n’allait pas bien »

-             « est-ce qu’il existe une toux à l’effort ? », « oui, mais seulement lorsque j’ai couru »

-             « est-ce qu’il y a un traitement de fond ? », « non je n’ai pas de traitement de fond ».

Le père est asthmatique très grave, la mère est allergique. Ce patient d’un milieu social élevé ne se reconnaît pas comme asthmatique.

2° cas

Pour montrer qu’il n’y a pas d’âge pour vérifier qu’il y a bien une radio pulmonaire dans le dossier et qu’elle est normale.

Il y a un an, une femme de 64 ans est adressée en consultation pour une gêne respiratoire. Elle a fumé et a des antécédents de dépression.

-             Depuis avril, elle est un peu fatiguée et elle a une gêne respiratoire avec toux persistante, quelques petits filets de sang et de temps en temps une respiration sifflante. Elle a été mise sous corticoïdes inhalés.

-             En juillet, elle est fatiguée et le traitement antidépresseur est repris.

-             En août elle voit un collègue qui ne la trouve pas trop mal cliniquement et jugeant que l’Athymil™ ne fait pas beaucoup d’effet, il demande quelques examens : NFS et iono qui sont normaux. Il la rassure. Elle part en vacances avec des corticoïdes par voie générale que lui prescrit un médecin et qui entraîne une certaine amélioration.

-             Ce n’est que trois mois après le début des troubles que cette femme a une radio qui décèle une image parahilaire droite que précise le scanner. Elle avait une tumeur de la bronche lobaire inférieure droite énorme.

-             Décès 3 mois plus tard.

Il faut savoir que 3 mois de retard dans le diagnostic peuvent être grave en matière de cancer. Tous les cancers n’ont pas un temps de doublement très rapide, certains mettent 1 ou 2 ans pour prendre un cm. Il y en a d’autres qui flambent et en trois mois sont condamnés.

3° cas

Une femme de 36 ans est adressée par un centre de rééducation neurologique. Elle a fait un incident respiratoire nécessitant une ventilation et suivi d’un incident de réanimation avec déficit neurologique brachio-facial. En fait cette complication est survenue après 12 jours d’intubation et de ventilation pour asthme. En étudiant ce qui se passait depuis trois mois, on apprenait qu’elle avait une dyspnée sifflante pour laquelle elle prenait de la Ventoline® de façon importante. Deux mois auparavant, la gêne était quotidienne et permanente ; elle prenait une bouffée par jour de béclométasone. Depuis quinze jours, n’ayant plus de nuits tranquilles, il avait été rajouté du Sérévent®.

Au total, pendant trois mois, non seulement elle n’a pas eu le bon traitement de fond (corticoïdes inhalés) et deuxièmement à aucun moment quelqu’un a fait le diagnostic d’asthme instable qui a décompensé. Si elle avait eu 40 mg de Cortancyl® ou Solupred® pendant 5 à 7 jours (= dose moyenne de corticoïdes), elle n’aurait pas fait d’accident.

4.2. Enseignements

Ces cas cliniques permettent de rappeler que, avant de porter le diagnostic d’asthme :

1 - La radiographie est indispensable, pour vérifier que l’image thoracique soit normale.

2 - Les EFR sont nécessaires dans le bilan initial pour évaluer les fonctions respiratoires de base.

4.3. Le Peak Flow

C’est le débit expiratoire de pointe (DEP) ; il est très différent du VEMS.

Les pneumologues ne s’intéressent qu’au VEMS (volume expiratoire maximum par seconde), parce que c’est le paramètre qui en dit le plus et qui est le plus reproductible. Quand le VEMS est normal c’est qu’il n’y a aucune anomalie (asthme ou autres anomalies thoraciques réduisant la ventilation).

Le Peak flow donne un résultat corrélé au VEMS et en règle une très bonne appréciation.

Si l’on enregistre à l’aide d’un pneumotacographe la courbe des débits expiratoires instantanés, on obtient les courbes ci-jointes :

Sujet normal (----)

Sujet asthmatique (- - - )

Le Peak Flow correspond à la crête de la courbe. Il se situe au 1/3 de l’expiration.

La valeur théorique du Peak flow varie en fonction du sexe, de la taille et de l’âge. Il existe des abaques en fonction de l’âge et du sexe..

-             Chez les hommes : 500 à 600 l/min 

-             Chez les femmes : 450 l/min.

Attention, comme seuil de gravité, il ne faut pas retenir 150 l/min, valeur qui est trop souvent prise en compte en urgence, car chez des personnes jeunes il se situe à un niveau plus élevé (exemple : 200 l/min. traduit un asthme sévère chez un homme de 30 ans).

L’intérêt pour le praticien d’avoir un appareil de mesure du Peak Flow dans sa sacoche est de pouvoir vérifier lors de la consultation ou en visite que les troubles fonctionnels ressentis par le patient soient en concordance avec le DEP pour éviter le piège de la sous-évaluation

 

5.    LES STADES DE SEVERITE

Les experts ont défini quatre stades de sévérité car le traitement de fond est différent suivant le stade auquel se trouve un asthmatique :

 

L’asthme intermittent tel qu’il se définit dans le tableau n’est pas suffisamment actif pour justifier un traitement de fond quotidien, car il a peu de chance d’aller vraiment mal rapidement. Il n’y a pas ou peu d’inflammation.

 

Les asthmes persistants se divisent en trois classes qu’il faut bien connaître

 

Asthme Intermittent

Gêne respiratoire < 1 fois/semaine

Fonction respiratoire normale (Peak Flow)

Asymptomatique entre les exacerbations

Brèves exacerbations

Symptômes nocturnes ≤ 2 fois/mois

Ne nécessite pas de traitement de fond

Asthme persistant léger

Gêne > 1 fois/semaine, mais < 1 fois/jour

Peak Flow normal

Exacerbations pouvant limiter l’action et sommeil

Symptômes nocturnes > 2 fois /mois

Traitement de fond par corticoïdes inhalés à faible dose

Asthme persistant modéré

Symptômes quotidiens

Peak Flow abaissé > à 60 % de la val. théorique

Exacerbations pouvant limiter l’action et sommeil

Symptômes nocturnes > 1 fois /semaine

Le traitement de fond doit être entrepris rapidement = fortes doses de corticoïdes inhalés

+ utilisation quotidienne de ß 2 mimétiques LA

 

Asthme persistant sévère

Gêne permanente au moindre effort

Fonction respiratoire très diminuée < 60% de la valeur théorique

Justifie parfois un traitement de corticoïdes au long court et de discuter la mise en surveillance hospitalière

 

La perception des symptômes par les patients est très difficile à évaluer. Des études de recherche sont actuellement orientées sur ce thème :

-             Une étude comparative japonaise portant sur des sujets normaux, des sujets asthmatiques n’ayant jamais fait de fortes crises d’asthme, et de sujets jeunes asthmatiques ayant déjà été intubés et ventilés a montré que lors de situation d’hypoxie les sujets ayant été déjà intubés et ventilés :

o        ne ressentaient pas de la même manière que les 2 autres catégories,

o        chez eux les mécanismes d’adaptation respiratoire ne se faisaient qu’imparfaitement.

-             Une équipe israélienne a fait une étude portant sur 120 jeunes asthmatiques, suivis par des généralistes. La fréquence de la dyspnée a été mesurée, et les sujets ont été classés en 2 groupes :

o        Ceux qui ressentaient correctement l’obstruction bronchique

o        Ceux qui ne la ressentaient pas. Dans le groupe des sujets qui ne ressentaient pas leur dyspnée, la mortalité fut de 15 % en 2 ans, mortalité qui était corrélée à une utilisation presque nulle de Ventoline®.

En conclusion, il est important, mais délicat parfois, de classer le stade auquel se trouve un asthmatique.

L’important est de bien évaluer les symptômes et leur retentissement fonctionnel. En France, on utilise sans doute trop le mot de crise. Il vaudrait mieux parler de gêne respiratoire qui favorise plus le dialogue avec le patient asthmatique.

 

6.    LE TRAITEMENT DE L’ASTHME

6.1. Les objectifs du traitement

Ils sont d’arriver à ce que le patient ait :

-             Peu ou pas de symptômes diurnes et nocturnes, (objectif difficile chez les sujets âgés)

-             Des crises d’asthme rares

-             Une activité non limitée, y compris l’exercice

-             Un recours réduit aux ß 2 mimétiques de courte action

-             Des EFR normales ou subnormales.

-             Sans avoir besoin de consultation en urgence

6.2. Stratégie du traitement

6.2.1. Le traitement de fond

Il ne s’adresse qu’aux « asthmes persistants ». ils sont classés en 3 groupes de gravité.

 

-            
Les corticoïdes inhalés sont les seuls médicaments de fond à donner à tous les asthmes permanents que l’on peut augmenter en fonction de la sévérité.

-             Les ß2 longue action sont des bronchodilatateurs de référence à associer aux corticoïdes inhalés. Ils sont indiqués dans les asthmes modérés et sévères, car il paraît excessif d’en donner à tous les asthmes persistants.

-             Les antileucotriènes s’adressent aux asthmes persistants légers à modérés et sont donnés avec les corticoïdes inhalés.

-             Les corticoïdes par voie générale au long cours trouvent leur indication dans les formes sévères malgré un traitement inhalé.

6.2.2. Dans les exacerbations sévères

Les corticoïdes oraux sont prescrits à la dose de 40 mg/jour pendant 4 à 10 jours et peuvent être stoppés brutalement si l’asthme est contrôlé

Le traitement symptomatique, essentiellement les ß 2 mimétiques de courte action, n’est utilisé que lorsqu’il y a des symptômes

6.3. Définition du contrôle de l’asthme

Le contrôle optimal

Le contrôle acceptable sous traitement de fond

-             Pas de consommation de ß2 agoniste de courte action

-             L’absence de symptôme diurne et nocturne

-             Une activité normale

-             Des EFR normales

-             Symptômes diurnes ≤ à 2 fois/semaines

-             Une consommation de ß2

-             Des EFR normales ou subnormales

 

Une remarque est à faire concernant l’évaluation de gravité des signes présentés par un asthme persistant, signes qui permettent le classement en asthme persistant léger ou modéré ou sévère. En effet on ne peut pas évaluer de la même manière

-             Un patient qui présente un asthme persistant alors qu’auparavant on pouvait le classer comme asthme intermittent et qui ne prend pas de traitement de fond. Dans ce cas, cela permet de dire que le sujet est rentré dans le cadre d’un asthme persistant et qu’il faut entreprendre un traitement de fond.

-             Un patient qui était déjà sous traitement de fond, dans ce cas, il faut tenir compte du traitement de fond pour évaluer le contrôle de l’asthme et l’objectif n’est pas d’obtenir un contrôle optimal mais un contrôle acceptable.

6.4. Les corticoïdes inhalés

Les corticoïdes inhalés constituent la base du traitement de l’asthme persistant.

Il est classique en Europe de commencer par les corticoïdes inhalés. S’ils ne suffisent pas, on va rajouter du Singulair™, des ß2 longue action.

6.4.1. Pourquoi les corticoïdes ?

Les corticoïdes sont les seuls médicaments à avoir un rôle simultané sur la toux, la réduction des secrétions alvéolaires, la diminution de l’inflammation, la diminution de l’action des médiateurs même s’il n’agissent pas sur les leucotriènes, et ils ont un rôle majeur sur les muscles bronchiques en potentialisant l’action des ß2.

La conséquence de cela est que les corticoïdes inhalés sont les seuls médicaments à pouvoir réduire la morbidité et la mortalité de cette maladie.

La Nouvelle-Zélande a la « palme » de la mortalité par asthme. Dans ce pays, une étude de cette mortalité et morbidité au cours des 30 dernières années a montré une réduction progressive importante de la morbi-mortalité depuis l’introduction des corticoïdes inhalés et de la pénétration de leur emploi dans les habitudes médicales.

Il faut commencer dans l’asthme persistant par les corticoïdes inhalés, il faut savoir manipuler éventuellement les autres médicaments (ß2 longue action « LABA » et antileucotriènes) mais toujours en association des corticoïdes inhalés.

 

Traitement

Asthme intermittent

Asthme Persistant

De fond

Aucun

Léger

Modéré

Sévère

Corticoïdes inhalés à doses croissantes en fonction du stade

 

ß 2 mimétiques à longue action (LABA)

+/- Antileucotriène

Corticoïdes oraux

De la crise

ß 2 mimétiques à courte action è à la demande (SABA)

 

6.4.2. Les patients vont prendre les corticoïdes inhalés pendant des années

Cela pose le problème de leur tolérance. Jusqu’à présent on considérait que les corticoïdes inhalés ne franchissaient que peu la barrière hématologique et que le risque de conséquences générales était négligeable. Une étude récente, parue dans le Lancet, remet en cause ce dogme tout au moins quand on utilise des doses journalières autour de 1 000 µg :

Une étude très bien conduite par Wong (GB) sur des asthmatiques de 20 à 40 ans utilisant des corticoïdes inhalés et en éliminant ceux qui prenaient des corticoïdes par voie orale. Ils ont mesuré la minéralisation osseuse avant l’introduction des corticoïdes inhalés et après une dose cumulée moyenne de prise pendant 6 ans avec une dose quotidienne autour de 1000 µg.

Ils ont constaté que, après l’accumulation des doses de méclobétasone sur des années, il y avait une petite diminution de la densité osseuse, mais non suffisante pour dire qu’elle soit pathologique. Mais cette constatation remet en cause l’inocuité des corticoïdes inhalés.

A partir de cette étude, les spécialistes considèrent qu’en cas de doses quotidiennes ≥ 1 000µg de façon régulière, il existe une indication à une surveillance densitométrique à partir d’une dose cumulée de 5 000 µg En effet 4 bouffées de 250µg / jour pendant 10 ans correspondent déjà à une dose cumulée de 3500 µg de corticoïdes inhalés.

Certains asthmatiques ne peuvent diminuer leur dose quotidienne au dessous de 500 ou 750 µg sans voir réapparaître leurs symptômes au bout de quelques jours à semaines ; les conséquences osseuses à 15 ou 20 ans ne peuvent être négligées, surtout s’ils sont jeunes (la dose cumulée se trouve à un même ordre de grandeur que dans le calcul ci-dessus). Aussi certains spécialistes commencent à suggérer d’abaisser la barre de l’indication à une surveillance par densitométrie chez les sujets qui prennent une dose quotidienne ≥ 500 µg de façon régulière (sans que l’on puisse la réduire).

6.5. Le problème de la compliance aux corticoïdes inhalés

Il est toujours difficile à évaluer. Une étude a été faite concernant la compliance des asthmes persistants vis-à-vis des produits inhalés. Il était demandé aux patients de noter sur un cahier tous les matins et/ou soirs chaque prise de ß2 agoniste courte action durant les 24 h et cela pendant 15 jours. Le produit leur était fourni, identique au produit habituel, mais le flacon nébuliseur possédant une puce invisible a permis de récupérer l’heure et la date de chacune des bouffées effectuées.

Sur le carnet individuel, le patient pour chaque jour a marqué toutes les bouffées qu’il « dit » avoir prises dans les 24 h, chaque bouffée étant signalée par un signe jaune et l’heure approximative. Travail très contraignant

Sur ce cahier après l’avoir récupéré ainsi que le nébuliseur, il est reporté, à partir des renseignements donnés par la puce et avec une autre couleur, chaque bouffée réellement effectuée en tenant compte des heures et en vis-à-vis des données fournies par le patient. 

Au regard de beaucoup de ces cahiers, la non concordance des 2 courbes est apparue évidente, non concordance portant sur :

§         Le nombre de bouffées : celui des bouffées réellement effectuées très inférieur à celui relaté par le patient

§         Les heures des prises

 

7.    Conclusions

§         L’asthme est une maladie chronique des bronches.

§         Nécessité d’une radiographie et d’EFR dans le bilan initial.

§         Classer le stade de sévérité pour adapter le traitement de fond.

§         Evaluer à chaque consultation le contrôle de l’asthme et mesurer le DEP.

§         Les corticoïdes inhalés représentent la base du traitement de fond à tous les stades de la maladie.