Pathologies ORL de l’enfant

D’après un exposé du Dr Nathalie Aisenberg

ORL Hôpital Simone Veil Eaubonne

Séance de formation du 2 avril 2009

1. Rappels anatomiques

Le système auditif comprend trois segments

· L’oreille externe : pavillon, conduit auditif externe

· L’oreille moyenne : tympan, la caisse du tympan, la chaine des osselets, la trompe d’Eustache. Il est rappelé, à ce propos que celle-ci est horizontale chez l’enfant et qu’elle peut donc être affectée lors des lavages de nez intempestifs.

· L’oreille interne : avec la cochlée et l’appareil vestibulaire

2. L’OTITE SERO-MUQUEUSE

2.1. Définition de l’otite séro-muqueuse (OSM)

C’est une otite à tympan fermé associant une production de mucus ou de sérosités à une dépression de l’oreille moyenne.

C’est une pathologie très fréquente de l’enfant de 18 mois à 5 ans et c’est la première cause de surdité chez l’enfant.

2.2. Mécanismes de l’otite séro-muqueuse

Plusieurs facteurs déclenchant sont reconnus. Ils peuvent être isolés ou concomitants. Il s’agit :

· D’une hypertrophie des végétations adénoïdes

· De rhinopharyngites à répétition

· D’otites infectieuses

· D’une inflammation de la trompe d’Eustache qui reconnait deux causes principales

o Le reflux gastro-œsophagien pour les moins de 2-3 ans

o L’allergie pour les plus de 5 ans

L’inflammation ou l’obstruction de la trompe d’Eustache associée à l’infection initiale, aboutit à :

· Une mauvaise ventilation de la caisse du tympan

· Une souffrance de la muqueuse, favorisée par la présence des germes

· Une sécrétion, au début de sérosités fluides qui se transforment en glue progressivement.

2.3. Clinique de l’otite séro-muqueuse

Certains points de la sémiologie méritent d’être soulignés.

· Il n’y a pas de douleur vraie mais une sensation de pesanteur ou de gêne.

· L’enfant se met souvent le doigt dans l’oreille

· Il a tendance à augmenter le son de la télévision et écoute de la musique avec une forte intensité. Ce point est important à connaître car dans le suivi sous traitement, un retour aux niveaux normaux d’écoute, est un bon signe de résolution de la pathologie.

· Il y a une propension à la surinfection du liquide à chaque rhinopharyngite, ce qui rend difficile le diagnostic basé sur l’aspect du tympan.

· L’existence d’otites moyennes à répétition augmente significativement le risque d’otite séro-muqueuses.

2.4. DIAGNOSTIC de l’OSM

L’Otoscopie

Elle met en évidence un tympan épaissi soit inflammatoire, soit blanchâtre, terne. Elle retrouve des bulles rétro-tympaniques.

L’impédancemétrie

C’est une tympanométrie qui est exprimée sous forme d’un tympanogramme.

Cet examen explore la compliance ou impédance du tympan, c'est-à-dire sa mobilité. Il crée une pression puis une dépression au niveau du tympan par le biais d’un embout étanche, placé dans le conduit auditif externe. Ces variations sont enregistrées sous forme d’un graphique.

Une courbe décalée vers les fréquences négatives évoque un catarrhe tubaire. Dans le cas des OSM, on observe une courbe arrondie en dôme ou une courbe plate.

Le suivi de la courbe est un bon moyen pour suivre l’évolution de l’OSM sous traitement.

Les autres examens possibles

Une fibroscopie du cavum est un examen possible mais assez contraignant qui ne s’envisage, en première intention que dans des cas particuliers en raison de son caractère invasif.

L’audiométrie vocale infantile, à partir de pictogrammes est facile à mettre en œuvre, même chez les enfants très jeunes ne savant pas lire.

2.5. Conséquences de l’otite séro-muqueuse

Une surdité

C’est une surdité de transmission de 5 à 60 décibels dont la caractéristique est de fluctuer avec le temps en fonctions des épisodes rhino-pharyngés.

Elle sera mise en évidence par des audiogrammes itératifs.

Les autres conséquences

On peut observer un retard de langage, un retard de la parole des troubles de l’articulation et une confusion des sons. L’enfant, dans ce cas est souvent adressé par l’orthophoniste. L’importance du trouble est variable en fonction de

· L’âge de l’enfant à l’âge d’apparition de l’OSM

· L’ancienneté de l’affection

· Son côté récidivant

Deux mécanismes associés vont conditionner la prise en charge thérapeutique :

· La mauvaise aération de la caisse du tympan

· L’infection initiale

2.6. Prise en charge de l’OSM

Les principes

Le traitement médical de première intention comprend :

· Le traitement de la cause

· L’administration de corticoïdes 1 semaine puis d’AINS pendant une quinzaine de jours

· Une antibiothérapie la 1^ère semaine

· Des fluidifiants parfois 1 mois, même s’ils ne sont plus remboursés par la SS !

· Une désobstruction rhynopharyngée (DRP)

En cas d’échec des traitements médicaux et la présence d’un retard de langage, une solution chirurgicale doit être proposée :

· Une adénectomie

· Une paracentèse

· La pose d’aérateurs trans-tympaniques (ATT)

L’ADENOïDECTOMIE

C’est l’ablation des végétations adénoïdes situées à l’arrière du voile du palais sous anesthésie générale, en chirurgie ambulatoire

Les indications sont maintenant bien codifiées, après échec des traitements médicaux et traitement des causes favorisantes, en cas :

· D’infections rhino-pharyngées à répétition

· D’obstruction

o Nasale

o Dans le contexte d’OSM

· D’otites moyennes aiguës

Elle n’est pas recommandée avant l’âge d’un an mais avant 7-8 ans, car à cette âge cette pathologie

Aérateurs trans-tympaniques

Les indications des ATT dans l’OSM

Ce sont les suivantes :

· Une surdité de transmission supérieure à 30 dB

· Une évolution supérieure à 3 mois malgré un traitement médical bien conduit

· Une association à un retard de langage

· Un contexte d’OMA à répétition

· Une OSM entraînant une poche de rétraction tympanique

Les différents ATT

Il existe deux types d’ATT ou drains :

· Les diabolos ou yoyos de type Shépard ou Donaldson qui ont l’avantage de s’expulser tout seul

· Les T tubes de Goode dont l’ablation nécessite une anesthésie

Les complications possibles des ATT

Elles ne sont pas très fréquentes. Peuvent être observés :

· Une otorrhée

· Une perforation séquellaire, à la chute de l’aérateur

· Un granulome inflammatoire autour du tube

En revanche

· Aucune contre-indication à prendre l’avion (bonne équilibration des pressions de part et d’autre du tympan)

· Pour la piscine ou la natation, pensez aux embouts sur mesure, même s’ils ne sont plus remboursés par la SS !

· En cas d’otite purulente, très peu de douleur et de fièvre, contribuant au raccourcissement de la durée du traitement.

2.7. Signes d’alerte auditifs

Il ne pas passer à côté des signes suivants, en écoutant et en faisant confiance a l’entourage. Les différentes étapes sont reprises dans le tableau ci-dessous.

Age	Symptômes
Premières semaines de vie	Absence de réaction de l’enfant au bruit ou à la voix lorsqu’il est éveillé mais calme
6-9 mois	Absence de modulation des émissions vocales et une absence d’orientation au bruit
12 mois	Absence de babillage (redoublement des syllabes)
12-18 mois	Absence de réaction à son prénom
18 mois	Absence de mots
18 mois	Incompréhension de phrases ou d’ordres simples
24 mois	Absence d’association de mots

3. AMYGDALECTOMIE

Il existe, actuellement deux indications principales de l’amygdalectomie qui sont

· Les angines à répétitions

· L’hypertrophie associée à un syndrome obstructif

3.1. Les Angines à répétition

Il faut en moyenne 4 à 5 angines par an, deux années consécutives pour rentrer dans cette catégorie.

Elles apparaissent volontiers après l’âge de 5 ans. Elles s’accompagnent d’une fièvre élevée. Elles s’accompagnent d’un retentissement scolaire.

3.2. L’Hypertrophie Amygdalienne

Hypertrophie clinique

Il s’agit de grosses amygdales, plus ou moins jointives qui aboutisse à une symptomatologie plus ou moins marquée, ce d’autant que l’enfant est plus jeune.

Elle s’accompagne :

· De peu ou pas d’angine

· D’un ronflement

· D’une voix caverneuse

· D’une respiration buccale

Le Syndrome obstructif avec retentissement

Durant la journée, il se traduit par une diminution de l’alimentation ; l’enfant mange peu. Cela se traduit par

· Une sélection alimentaire avec, parfois, des phénomènes de blocage

· Une cassure de la courbe staturo-pondérale

· Une somnolence diurne ou le besoin impérieux de sieste

· Un essoufflement dans le sport

· Un ralentissement scolaire

· Parfois, au contraire, une agitation voire une hyperactivité

La nuit, peuvent s’observer :

· Des ronflements

· Des sueurs nocturnes

· Une agitation, l’enfant se découvre

· Des cauchemars avec des réveils fréquents

· Une énurésie, surtout chez les garçons

Les apnées

Il s’agit de pauses respiratoires d’au moins 5 secondes (10 secondes chez l’adulte). Elles entraînent des désaturations importantes.

Elles sont suspectées par le clinicien. Elles peuvent, aussi, être rapportées par les parents.

Elles sont authentifiées par la polygraphie respiratoire à domicile ce qui lui permet d’être aisément répétitive. Son intérêt est triple :

· Elle conforte l’indication opératoire

· Elle permet de débrouiller les cas difficiles, comme par exemple, les enfants de moins de 3 ans avec ronflement important et hypertrophie amygdalienne importante.

· Elle permet de mieux gérer la surveillance des enfants présentant un index d'apnée hypopnée (IAH) important avec nombreux micro-réveils et désaturant vite en post opératoire.

Le but final est de pouvoir éviter d’opérer les enfants présentant une hypertrophie amygdalienne isolée, sans retentissement et, ainsi, mieux gérer les enfants apnéiques.

4. MASTOIDITE

4.1. La mastoïdite aigüe

C’est une complication de l’OMA bactérienne.

Dans ce cas, il s’agit d’une OMA collectée avec des particularités, parfois difficiles à mettre en évidence. Il s’agit :

· D’un bombement de la partie postéro-supérieure du conduit auditif externe

· Un bombement de la membrane tympanique, prédominant dans le quadrant postéro-supérieur avec un aspect dit « en pis de vache »

·

Parfois les signes de mastoïdite aigüe sont plus nets avec :

· Un décollement du pavillon de l'oreille, évident en comparant le côté controlatéral

· Un abcès soit sous-périosté, soit sous-cutané

Parfois le diagnostic peut être fait à l’occasion :

· D’une otite trainante sous traitement médical, s’accompagnant de fièvre, d’une otalgie persistante, associée à une altération de l’état général.

· Une complication d’emblée avec fièvre et otalgie

Enfin, il ne faut jamais négliger une altération de l’état général, sans cause évidente.

4.2. Les pathogènes

Les germes habituellement rencontrés sont :

· Des pneumocoques: 29 à 50%

· Des streptocoques du groupe A : 9 à 43%

· Des staphylocoques : 5 à 16%

· L’Haemophilus influenzae, plus rarement dans 5 à 16%

4.3. Traitement

Il consiste en une antibiothérapie IV probabiliste à large spectre, comme par exemple une céphalosporine de 3^ème génération comme la ceftriaxone ou le céfotaxime en monothérapie.

La chirurgie de drainage est inutile dans la majorité des cas. Cependant, il subsiste des indications chirurgicales formelles :

· La présence de complications

· L’absence d’amélioration clinique après 48 à 72h de traitement médical bien conduit

5. ETHMOIDITE

5.1. Rappels anatomiques

Les différentes parties de l'os ethmoïde se situent entre les orbites et forment ainsi une partie de la paroi interne de chaque cavité orbitaire (appelée lame papyracée) et de la paroi latérale, ainsi qu'une partie du plafond de la fosse nasale.

Le segment de l'os ethmoïde qui forme une partie de la paroi interne de la cavité orbitaire est appelée lame papyracée, alors qu'un autre segment, qui forme le plafond et la partie postérieure de la cloison nasale est appelé lame perpendiculaire de l'ethmoïde. Deux projections irrégulières de l'ethmoïde, en forme de coquille, sont appelées cornets supérieur et moyen et forment des saillies sur la paroi interne de la fosse nasale.

5.2. Clinique

Cette pathologie est particulièrement fréquente à l’âge des rhinopharyngites de 6 mois à 4 ans car c’est le seul sinus développé jusqu’à l’âge de 2 ans.

Le tableau clinique associe

· Une fièvre élevée avec altération de l’état général

· Un gonflement de la paupière supérieure et inférieure, débutant à l’angle interne de l’œil

· Une rhinorrhée homolatérale qui est signe important

5.3. Les pathogènes

Les germes habituellement rencontrés sont :

· Des staphylocoques dorés

· L’Haemophilus influenzae

· Des pneumocoques et des streptocoques

· Parfois des anaérobies

5.4. Les diagnostics différentiels

Les principaux sont les suivants :

· La piqûre d’insecte

· La dacryocystite

· La conjonctivite

· La cellulite

5.5. Les complications

Les infections orbitaires peuvent être redoutables et mettent en jeu l’œil. Il peut s’agir :

· Cellulite préseptale (en avant du septum orbitaire) avec un œdème palpébral

· Cellulite rétroseptale avec, le plus souvent, un abcès sous-périosté, compliquée :

· De paralysie oculomotrice

· D’exophtalmie

· De mydriase aréactive (III intrinsèque)

· D’anesthésie cornéenne

· D'une baisse de l’acuité visuelle

Elles aussi être neurologiques avec un risque de méningite, d’abcès cérébral ou de thrombophlébite du sinus caverneux

5.6. Conduite à tenir

Les formes débutantes peuvent être traitées en ambulatoire avec une antibiothérapie du type amoxicilline/acide clavulinique sous surveillance clinique rapprochée.

Dans les autres cas, une antibiothérapie IV (ceftriaxone ou cefotaxime + un antistaphylococcique + si doute métronidazole) en hospitalisation s’impose. Une corticothérapie sera débutée au 2^ème jour.

Un drainage chirurgical en cas d’abcès de plus de 5 mm peut être nécessaire, par voie externe ou endonasal.